GAY (J.)

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GAY JOHN (1685-1732)

Orphelin dès l’âge de dix ans, John Gay fut placé par son oncle à l’école de Barnstaple où il eut un bon maître latiniste, qui lui donna l’amour des classiques. À sa sortie de l’école, il fut pris en apprentissage chez un mercier en soieries à Londres. Il ne semble pas que le métier l’ait beaucoup intéressé — ses goûts l’attiraient plutôt vers la société littéraire où il se fit des amis. Il publia un premier poème (médiocre) en 1708, à la louange du vin, et vers 1712 trouva son premier «patron», la duchesse de Monmouth, qui en fit son intendant. Peu après, Swift le plaça chez lord Clarendon, qui l’emmena au Hanovre — mais Gay avait déjà écrit ses premiers poèmes, Plaisirs champêtres (Rural Sports , 1713), «géorgique» où Gay imite Windsor Forest (1713) de Pope, mais qu’il émaille plaisamment de ses souvenirs d’enfance dans le Devon. Il se lançait décidément dans les hasards de la carrière poétique.

La même année, il publie un poème héroï-comique L’Éventail (The Fan ), que la «diction poétique» rapproche de l’épopée satirique de Pope, Le Vol de la boucle de cheveux (The Rape of the Lock , 1712), et, un an plus tard, La Semaine du berger (The Shepherd’s Week ), six poèmes pastoraux parodiques, destinés à se moquer des pastorales d’Ambrose Philips (1675-1749), poète que Pope détestait et dont il était jaloux. Après quoi, ce fut Trivia, ou l’Art de marcher dans les rues de Londres (Trivia, or the Art of Walking the Streets of London , 1716), allègre poème satirique, réaliste et plein d’humour, où Gay décrit avec minutie les mille spectacles offerts par les rues de Londres à l’époque géorgienne. Il fait peut-être mieux que Boileau avec ses Embarras de Paris ; il est moins grave que Samuel Johnson dans son beau poème sur Londres; il est pittoresque et amusant; on dirait un chasseur d’images malicieux, dont l’observation s’enrichit toujours d’une fine remarque psychologique. À la même époque, Gay écrit quelques Églogues , dont au moins une, dans la même veine, a des accents quasi swiftiens, et, vers la fin de sa vie, une soixantaine de Fables en deux volumes (1727 et 1732), amusantes et satiriques, mais qui ne sont pas l’œuvre d’un grand fabuliste.

À elle seule, cette œuvre poétique aurait suffi à assurer à Gay un nom dans l’histoire littéraire, mais il a un titre de gloire plus éclatant, celui d’être l’auteur de l’Opéra du gueux (Beggar’s Opera ). Il avait déjà abordé le théâtre avec The Mohocks (1712), farce tragi-comique en trois scènes (les Mohocks étaient les voyous aristocratiques de l’époque); Le Comment appelez-vous ça? (The What d’ye call it? , 1715), farce tragi-comico-pastorale, salmigondis parodique de personnages, de situations et de coups de théâtre; Trois Heures après le mariage (Three Hours after Marriage ), farce écrite en 1717 en collaboration avec Pope et John Arbuthnot. Mais en 1728, ce fut le triomphe de Beggar’s Opera , dont le succès ne s’est pas éteint. Adaptée par Bertolt Brecht au goût du jour, et transposée dans une perspective idéologique contemporaine, cette pièce, devenue l’Opéra de quat’ sous (Die Dreigroschenoper , 1928), change le bandit en bourgeois, et remplace les airs charmants du XVIIIe siècle par les dissonances de Kurt Weill. La comédie de Gay est à la fois, avec ses quelque soixante-dix chansons, une parodie amusée de l’opéra italien (qui devenait envahissant) et une satire politique enjouée qui donne au bandit de grand chemin, Macheath, des allures de grand seigneur, aimé et trahi par les femmes, mais surtout trahi par le fripon Peachum, maître receleur et son complice, qui trafique «honnêtement» avec la justice corrompue. L’action se joue entre l’obsédante prison de Newgate et l’antre du chef receleur, les frasques amoureuses de Macheath tissant un lien d’opérette entre les deux lieux scéniques. Beggar’s Opera eut un énorme succès, qu’il rencontre de nouveau lors de la reprise à Londres, en 1920. En France, la comédie fut jouée à Marseille dans sa version intégrale, avec les airs originaux, par la compagnie du Rideau gris en 1930.

Beggar’s Opera eut une suite: Polly (1729), qui transporte les deux héros, Macheath et Polly, aux Antilles, où Macheath devient chef des pirates, et où Polly combat avec les Indiens pour les repousser. La pièce fut interdite pour des raisons politiques. Sir Robert Walpole, le Premier ministre, que l’on identifiait déjà avec le premier Macheath, trouva le second encore moins à son goût. Il avait tort: Polly , sur le plan artistique comme sur celui de la satire, ne valait pas Beggar’s Opera .

Encyclopédie Universelle. 2012.

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